Accueil
 
Mon oncle Benjamin
   


Jacques Brel et Claude Jade
Mon oncle Benjamin
,
film d'Edouard Molinaro, 1969


Mon édition Le serpent à plumes
de Mon oncle Benjamin

Pour la plupart des gens, Mon oncle Benjamin est un film italo-français réalisé par Édouard Molinaro, sorti en 1969 - à voir de toute urgence si ce n'est déjà fait, ou à revoir ! Sous le règne de Louis XV, Benjamin Rathery (Jacques Brel) est médecin à Clamecy (Nièvre), il soigne principalement les pauvres du pays, qui ne le peuvent payer. Couvert de dettes qu'il ne règle pas non plus, ses créanciers et les huissiers le poursuivent sans cesse. Il est aussi (surtout) un ripailleur perpétuel et paillard, grand amateur de vin entouré d'une bande d'amis à son image, et un coureur de jupons invétéré. Une seule fille, dont il est follement amoureux, lui résiste, Manette (Claude Jade). Elle n'entend céder au médecin que s'il l'épouse en justes noces, or Benjamin exècre le mariage comme l'injustice. Le défi jeté à un jeune noble va lui valoir quelques ennuis avec l'aristocratie locale dont il se vengera avec succès par l'adultère et l'humiliation.

Brel, virevoltant, colle à la perfection à la figure révoltée et rebelle, libertine et libertaire du médecin à l'habit rouge, personne mieux que lui ne pouvait incarner Benjamin Rathery. Il est Benjamin Rathery et ses aventures respirent une joie contagieuse.

Reste que le film de Molinaro est inspiré d'un livre écrit par un certain Claude Tillier : le scénario du film, qui a cependant éliminé quelques scènes pourtant savoureuses j'imagine pour des raisons de longueur de pellicule, est incroyablement respectueux de l'ouvrage d'origine, jusque dans l'humour, la facétie maline, la joie, le respect du texte enfin. L'amical docteur Minxit le bien nommé*, qui veut donner sa fille Arabelle en mariage à Benjamin, y diagnostique les maladies dans les urines tout aussi bien :

– Cela, c’est de l’urine de ta femme, n’est-ce pas ?
– C’est vrai, monsieur Minxit, dit le paysan.
– Elle a fait une chute, ajouta le docteur, examinant de nouveau la fiole.
– Voilà qui est on ne peut mieux deviné.
– Sur un perron, n’est-il pas vrai ?
– Mais vous êtes donc sorcier, monsieur Minxit ?
– Elle a roulé quatre marches.
– Cette fois, vous n’y êtes plus, monsieur Minxit ; elle en a roulé cinq.
– Allons donc, c’est impossible; va recompter les marches de ton perron, et tu verras qu’il n’y en a que quatre.
– Je vous assure, monsieur, qu’il y en a cinq et qu’elle n’en a pas évité une.
– Voilà qui est étonnant, dit M. Minxit, examinant de nouveau la fiole; cependant il n’y a bien là-dedans que quatre marches. A propos, m’as-tu apporté toute l’urine que ta femme t’avait remise ?
– J’en ai jeté un peu par terre, parce que la fiole était trop pleine.
– Je ne suis plus surpris si je ne trouvais pas mon compte; voilà la cause du déficit : c’est la cinquième marche que tu as renversée, maladroit ! Alors, nous allons traiter ta femme comme ayant roulé cinq marches d’un perron.

Claude Tillier est né en 1801 à Clamecy et y vécut une bonne partie de sa vie. Il fut maître d'études, instituteur, directeur d'école, pamphlétaire, journaliste et écrivain. Il mourut à quarante-trois ans.

"Quiconque n'a pas lu Mon Oncle Benjamin ne peut se dire de mes amis", déclara en compagnie de son ami René Fallet Georges Brassens à Michel Polac le 19 juillet 1967 dans l'émission TV de ce dernier, Bibliothèque de Poche (ORTF, archives INA). Je me suis empressé de le lire.


* En latin, mingere : uriner. Mingit : il urine. Claude Tellier s'amuse au prix d'une consonne et dénonce les charlatans.

Haut de page